DISCOURS DE HAINE ET ÉPIDÉMIE À L’ÈRE D’INTERNET : ETUDE DE CAS SUR LE COVID19 EN FRANCE
Il apparait de façon plutôt évidente qu’Internet et en particulier les réseaux sociaux reflètent les questions de société, les connaissances, mais aussi les peurs et leurs tentatives d’explication. En raison du confinement, les personnes sont plus enclines à rechercher, discuter et interagir en ligne via les réseaux sociaux. Les impacts négatifs des stéréotypes se trouvent renforcés en temps d’épidémie, des stéréotypes eux-mêmes basés sur les mécanismes du bouc-émissaire et et la dissémination des rumeurs.
Ce phénomène social et psychologique bien connu a déjà pu être tristement observé au cours de précédentes pandémies globales.
Au Moyen-âge, plusieurs groupes comme les Protestants, les Roms, les mendiants et surtout les Juifs ont été accusés d’empoisonner les puits. Ces accusations médiévales étaient en lien avec les vagues de crises sanitaires telles que la « Mort Noire ». La relation entre montée de l’antisémitisme et l’épidémie de peste noire (peste bubonique 1348-1351) en Europe est un exemple très clair du terrible impact des mécanismes du bouc-émissaire et de diffusion des rumeurs.
D’aucun ont cru que l’épidémie était une punition divine des péchés humains. La majorité chrétienne familière de la rhétorique anti-juive a contribué à cette diffusion principalement à travers des prières. Les populations juives étaient accusées de meurtres rituels, de profanation d’hosties à l’encontre des Chrétiens. Elles étaient représentées avec des cornes et des queues et ainsi associées au Diable. Elles étaient également accusées de mener des sacrifices humains sur des enfants chrétiens lors de la Pâque juive, pour ainsi récupérer le sang et préparer le pain non levé de la fête. Par conséquent, la population juive a représenté peu à peu la cible idéale à blâmer et à massacrer, afin d’échapper à la terreur et à la mort.
Au début du XXème siècle, les médecins et institutions ont développé un intérêt accu pour la « médecine hygiénique » : un nouveau champ d’investigation scientifique. Les spécialistes effectuaient des comparaisons entre les risques de décès et les bénéfices économiques que la migration pouvait engendrer. Aussi, ils considéraient les étrangers à la fois comme vecteurs de maladies et transmetteurs de leur propre caractéristiques héréditaires. Dans les hôpitaux, les migrants étaient décomptés, le danger « qu’ils apportait » en France était évalué, et les risques pour la population française et sa « race » très sérieusement pris en compte. Les politiques médicales mise en œuvre avant la seconde guerre mondiale se sont efforcées de ce fait de combattre l’immigration. La médecine servait alors d’outil, d’argument scientifique.
Depuis le début de la crise sanitaire liée au covid19, nombre de théories du complot, fake news et propos haineux ont été diffusés sur les réseaux sociaux. Ces théories de haine présentent des similarités avec les stéréotypes traditionnels, en terme de rhétorique et de mécanismes (tels qu’expliqués plus haut).
Les classiques théories du complot visant les Juifs ont été publiées tout d’abord sur des réseaux sociaux alternatifs puis diffusées plus largement sur les réseaux traditionnels.
Début mars, le candidat aux élections municipales Alain Mondino a « liké » et partagé sur Twitter une vidéo intitulée « Coronavirus for goyim » (Coronavirus pour les Goyim) provenant de Vkontakte - un réseau social russe. Selon la vidéo, l’épidémie du covid19 aurait été créée par les Juifs. « Ils » auraient comploté et décidé de répandre la maladie afin d’assoir leur pouvoir hégémonique.
L’idée de complot est partagée par l’activiste d’extrême droite Johan Livernette sur son blog : Le président Emmanuel Macron seraient une marionette actionnée par les banques internationales et le CRIF.
D’autres sites internet comme « Démocratie participative » ont diffusé plusieurs théorie antisémites. Celles-ci utilisent les mêmes rhétoriques et mécanismes que les traditionnels procédés médiévaux de la Peste noire précitée. Les articles publiés sur ce site haineux en janvier titrent par exemple « Empoisonnement : la hyène juive Buzyn [ex-ministre de la santé] avec sa déclaration disant « nous ne pouvons pas fermer nos frontières » pour arrêter la propagation du coronavirus ; « prix de l’essence, bourse en chute libre, quarantaine de masse : la punition de l’Occident Juif est en cours. »
Le covid19 est également utilisé par des individus ou d’influents dirigeants à l’encontre d’autres Etats et d’idéologies rivales. Nombre de théories assurent qu’il s’agit d’un moyen pour Israël de diffuser son pouvoir hégémonique à travers le monde. L’épidémie est aussi perçue comme une arme utilisée dans un but de domination planétaire.
Le contexte du covid19 met en lumière Afro-phobie et racisme anti-Arabes liés à l’islamophobie. Les articles publiés par le journal d’extrême droite Valeurs Actuelles contribue à répandre des contenues racistes visant les quartiers populaires. Par exemple le magasine met à la une le titre suivant : « Barbès, Château Rouge, La Chapelle: les quartiers où l’on se moque du confinement »
Un tel titre vise à cibler un groupe d’individu sur la base de leur origine, de leur religion supposée et de leur classe sociale. En effet, selon plusieurs rumeurs, les mesures mises en place dans le cadre du confinement ne seraient pas respectées dans les quartiers populaires de Paris en raison de leur forte concentration en « migrants » .
Le covid19 est également utilisé par des individus ou d’influents dirigeants à l’encontre d’idéologies ou d’autres Etats. Nombre de théories assurent qu’il s’agit d’un moyen pour Israel de diffuser son pouvoir hégémonique à travers le monde. L’épidémie est aussi perçue comme une arme utilisée dans un but de domination planétaire.
L’épidémie met en lumière Afro-phobie et racisme anti-Arabes liés à l’islamophobie. Les articles publiés par le journal d’extrême droite Valeurs Actuelles contribue à répandre des contenues racistes visant les quartiers populaires. Par exemple le magasine met à la une le titre suivant : « Barbès, Château Rouge, La Chapelle: les quartiers où l’on se moque du confinement »
Un tel titre vise à cibler un groupe d’individus sur la base de leur origine, de leur religion supposée et de leur classe sociale. En effet, selon plusieurs rumeurs, les mesures mises en place dans le cadre du confinement ne seraient pas respectées dans les quartiers populaires de Paris en raison de leur forte concentration en « migrants ».
Un internaute d’extrême droite a tweeté « Quand comprendrez-vous que ce pays doit être nettoyé ? ». Le tweet sous-titrait une courte vidéo montant un quartier parisien plein de monde.
La stigmatisation apparait aussi sur les chaînes de television : « Les musulmans disent aux policiers ‘c’est une maladie pour les blancs, nous sommes protégés par Allah’ » a déclaré le politologue Eric Zemmour sur CNews.
Parfois, les informations sont manipulées par des influenceurs d’extrême droite. Sur Twitter, le compte « Napoléon » a partagé une analyse islamophobe relative à l’interdiction de l’alcool par le Préfet de l’Aisne. Il affirme que le préfet est musulman, en s’appuyant son nom Arabe, et soutient que la décision a été prise sur le fondement de la Charia. En réalité, le préfet est d’origine libanaise maronite, et a décidé d’interdire la vente d’alcool pour des éviter les violences familiales. De plus, la décision a été annulée un jour plus tard.
Mais quelques fois, les chefs religieux n’aident pas à contrer le discours de haine. De façon générale il existe une tendance à considerer les maladies comme des problèmes qui ne nous affectent pas nous-mêmes ou le groupe auquel nous appartenons.
Ce type de déni peut être analysé comme un réflexe d’auto-protection. Mais il peut aussi constituer les prémices d’une hiérarchie entre les individus. Les fortes valeurs aident à la cohésion de groupe. Aussi, plusieurs groupes religieux perçoivent le covid19 comme une punition : une sanction divine pour les péchés de l'Humanité tels que la fornication, les avortements, les unions libres, les relations homosexuelles…
Plus d’information sur les théories du complot sont disponible sur la carte créée par “Conspiracy Watch” :
https://www.conspiracywatch.info/la-carte-des-theories-du-complot-sur-le-coronavirus.html
https://fr.timesofisrael.com/coronavirus-le-bnai-brith-se-penche-sur-les-theories-du-complot-juif/